De Innisfail à Red DEER

Découvrez l'aventure canadienne des HERMARY

Innisfail: un premier pied à terre

Sur la route entre Calgary et Innisfail, l’espoir renait :

…nous voyageons dans une plaine souriante toute parsemée de bouquets d’arbres, de grands troupeaux s’y proménent…cela devient plus agréable.

Emile arrive, avec une quizaine d’autres Français, vers midi le dimanche 27 mai 1906 à Innisfail (petite ville de l’Alberta qui compte 700 habitants à cette époque) là où les missionnaires de Sainte-Marie de Tinchebray venaient de poser leur tente (suite aux expulsions de France).Ils y rencontrent le père Voisin (missionnaire français).

A la recherche d’une auberge ou d’un hôtel, c’est finalement Mr Humbert de Lille, qui avait réussi à louer une maison, qui leur offre l’hospitalité jusqu’au 5 juin !
Le soir, rendez-vous chez le père voisin pour le salut (car pas d’église) puis discussions entre eux. Hélas les informations ne sont guère encourageantes :

…plus d’homestead(maison) à prendre ou alors il faut se plonger dans le nord et l’ouest à des distances de plus de 200, 300 kilomètres en avant des chemins de fers et y vivre comme des sauvages…

Après cette révélation que faire ! il était 11h du soir. J’allais me coucher et me reposais tranquillement confiant en Dieu et la sainte Vierge

Le 28 mai, Le Père Voisin lui annonça que le contracteur qui avait commencé l’Église, la veille, venait de renoncer à travailler pour des catholiques. 

…je me suis mis à l’oeuvre sur le champ; le père m’expliqua son plan et en avant me voila charpentier…

—“Eh bien, Père, s’écrit Emile Hermary, ce n’est pas contraire à ma religion de travailler pour vous, et demain je suis à vos ordres.”

Et 24 heures après son arrivée, ce brave catholique, suivi d’une demi-douzaine d’autres, bâtissait l’Église.

Nous sommes le 7 juin 1906, la construction de l’église avance, et Emile annonce une très grande nouvelle à sa femme:

En face de l’église, il se trouvait deux lots… le Père nous a conseillé de les acheter, c’est ce que nous avons fait. Louis Clery et moi. …nous voilà propriétaires au Canada et dans 15 jours ta maison sera bâtie.

…nous voila propriétaires au Canada et dans 15 jours ta maison sera batie. Tu comprends ma chère Maria ce que cela veut dire ? Eh bien oui, viens de suite; prépare ton départ active toute le plus vite sera le mieux.

Nous vivons en commun avec le père Voisin et son confrère le père Chaunvin mais un ménage de garçon ça ne vaut guère.

La maison était trop petite pour y dormir, nous avons commencés la sacristie vendredi matin et lundi soir nous y couchions à 2 Louis et moi.

Il y’a beaucoup d’avenir ici pour qui s’est se dégrouiller. J’apprends l’anglais avec le Père et dans 4 mois je pourrais me débrouiller en langue Anglaise…

Bien le bonjour à tous…mes chers enfants qu’ils seront heureux ici à courir dans les bois à cueillir des Saskatoon pour faire de la confiture…

Amélanchier : ses fruits sont appelés amélanches (ou saskatoon en langue Cri, d'où l'autre expression les désignant, « baies de Saskatoon »

La Famille débarque

Finalement, c’est d’abord Gervais Hermary (frère cadet d’Emile) accompagné de sa femme et sa fille qui débarque le 2 juillet 1906 au port de Québec.
Maria Duhayon -femme d’Emile Hermary- accompagnée des enfants, arrive au port de Québec le 28 juillet 1906 à bord du SS Carthaginian.
Célestin Hermary (frère cadet d’Emile) arrive accompagné de sa femme et de leurs deux enfants le 10 mai 1907 à Halifax.
Mathilde Hermary (sœur ainée d’Emile) elle aussi rejoint ses frères au Canada. Mais à ce jour nous n’avons pas su retrouver une trace de la date de son arrivée.

Emile et ses malheurs

Courant juillet 1906, Emile toujours occupé à travailler sur l’église, fais une chute du haut de la toiture. Celle-ci le laissa entre la vie et la mort. Il resta à l’hôpital un mois.

Maria Duhayon-Hermary emprunte le même parcours qu’Emile. Elle arrive au port de Québec le 28 juillet 1906 à bord du SS Carthaginian. Voyant Emile amaigri et chancelant, elle s’écria: « C’est ça le Canada ? Vite mon vieux, en route pour la France ! ». il faut dire qu’Emile avait perdu pas loin de 50 livres (soit un peu plus de 20kg). Mais une fois renseignée elle fut convaincue.

L’année suivante, les paroissiens d’lnnisfail voulaient finir l’intérieur de l’Église pour Noël, et après son travail à la briqueterie, M. Hermary allait passer 2 ou 3 heures à travailler à la lueur d’une lampe. Un soir, à 10 heures, l’échafaudage céda sous leurs poids et il se retrouva avec son compagnon sur les marches de l’autel, la jambe fracassée à 4 places… Trois mois d’hôpital, 5 opérations et les médecins constatèrent que la gangrène commençait son œuvre et qu’il faudrait bientôt l’amputer.

Après une neuvaine à Mère Marie Madeleine Postel faite par la famille, il se rend à l’hôpital où on doit l’amputer, mais une fois dans la salle d’opération, les médecins constatèrent, en enlevant les pansements, que sa jambe était beaucoup mieux et que la gangrène avait disparu. Ce fut une grande joie et tous rendirent grâce pour ce miracle.

M. Hermary ayant quelques difficultés à marcher avec sa jambe, sa femme prit quelques pensionnaires français pour augmenter les revenus et avec les enfants ils semèrent un grand jardin. Au temps de la récolte, les enfants allèrent vendre les légumes dans une voiturette de porte en porte. Soeur Émile se rappelle avoir frappé aux portes et demandé; “Do you want some vegetables? 5 cents a bunch…“ Les ventes se faisaient facilement.

La vie à Red Deer

En 1910, Ia famille vint s’installer à Red Deer en face du couvent des Filles de la Sagesse afin que ses 3 fils et sa fille puissent fréquenter le couvent. M. Hermary était pour l’achat et la vente des fermes.

En 1927, il fut à l’origine du comité de colonisation de l’A.C.F.A. qui encourageait les canadiens-français de l’Est à venir s’établir dans l’Ouest pour y cultiver les fermes. Il demanda à la ville de continuer la rue Gaetz vers le nord, mais on refusa car on trouvait la côte trop abrupte, Avec l’aide de ses amis et de quelques grattoirs tirés par des chevaux, ils entreprirent de faire un chemin pour remonter la côte. Voyant que la chose était possible la ville termina cette rue qui avait l’avantage de raccourcir de plusieurs milles la sortie vers le nord.Ses fils Gabriel, Édouard et Gilbert ont respectivement 11, 13 et 13 enfants.

Sa fille unique Antoinette (Sr Emile) fêta, en 1974, ses 50 ans de vie religieuse chez les Filles de la Sagesse.

M. Emile Hermary est décédé en mai 1948 et son épouse, Maria, alla le rejoindre, peu de temps après, en septembre de la même année. Leur fils Gabriel mourut en 1963.

En novembre 1973, on honorait la mémoire de ce valeureux pionnier en lui dédiant la nouvelle bibliothèque de l’école élémentaire Montfort.

M. Hermary a aidé la commission scolaire catholique de Red Deer durant 32 ans.

Monsieur et Madame Hermary en plus d’être de courageux pionniers, les plus vieux de la paroisse de Red Deer, étaient de fervents chrétiens qui aidèrent leurs compatriotes.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *